La face cachée des jeux-vidéo


Comme la lune, le jeu vidéo à sa face cachée

Le jeu vidéo , à ses débuts, n'était qu'une question de score. Pong est, par exemple, un jeu ou le but est de battre l'adversaire en points ; Les shoot'em'up, d'avoir un maximum de chiffre après le premier; Les FPS comme Call of Duty, d'avoir un bon ratio et donc, un gros score (tout du moins, meilleur que les autres).

Le score est l'essence même de pourquoi nous jouions (et jouons encore parfois). Il donne un but, un objectif. De nos jours, Il est souvent secondaire : Sa forme la plus courante, les "Succés" ou "Trophés", ne sont au final qu'une preuve de nos exploits en jeu, une façon de scorer différente qui ne rapporte rien sinon un bel égo..
Mais il se révèle parfois le vrai sens d'un jeu, l'essence de son gameplay : Prenons les shoot'em'ups, et notamment les danmaku de Cave. Leur intérêt, si on ne fait pas attention à l'aspect scoring, est assez discutable : On finit le jeu, puis basta. Pourquoi revenir sur le jeu si on ne score pas ? Pour profiter de graphismes déjà vues une fois ? d'un gameplay fait pour le score qui, vidé de cette composante, perd toute sa complexité ? bien peu le feraient. D'autant plus que dans ce type de jeu en particulier, le score est bien souvent synonyme d'acquisition d'items et de bonus, comme des artworks, musiques, nouveaux personnages, etc...

Mais laissez moi illustrer ici mes propos avec deux titres : Caladrius et Radiant Silvergun.

Caladrius
Le premier est un titre récent, développé par Cave pour Xbox 360 (uniquement pour le territoire japonais, mais vu le scénar', que ce soit en japonais ou en arachnéen c'est toujours aussi nul), l'autre est un mythe indémodable du jeux vidéo (côté à prix d'or par ailleurs) de la Saturn.
Radiant Silvergun
Ces deux titres partagent en commun une caractéristique : Pour avancer, il faut scorer. Si vous ne scorez pas un minimum, vos armes n'évoluent pas, et vu le niveau de difficulté du jeu, vous mourrez en permanence et finirez par ne plus pouvoir avancer.
C'est par leur singularité que ces deux exemples sont intéressants. Le système de gameplay y existe en dehors du score : Les graphismes sont beau, les armes tuent  les ennemis dans des explosions de couleur chatoyantes, et surtout il n'y a pas de "barrières" : Si vous n'upgradez pas une arme, le jeu ne vous empêchera pas l’accès à certains niveaux.
Et pourtant, le score est essentiel dans ces deux jeux, alors même qu'Il n'est  pas à proprement parler un élément indissociable du jeu. Par indissociable, J'entend les aspects fondamental d'un jeu, les mécaniques qui font du produit (le jeu) ce qu'il est et non autre chose, comme un film ou un livre.
Prenons un exemple : Le jeu de combat. Si vous enlevez le système de combat d'un tel type de jeu, alors il n'est plus un jeu de combat : Pourtant, il reste les graphismes, la musique, l’enchaînement des niveaux, les différents personnages... Certes, mais vous avez enlevé ce qui faisait du jeu un jeu de combat : Vous lui avez retiré son aspect fondamental, Il ne peut donc plus être considéré comme tel et perd 90% de son intérêt.
à contrario, si vous retirez le système de combos, vous n'empêchez pas le jeu d'être un jeu de combat ; Néanmoins, vous en retirez un aspect important du gameplay, sans lequel celui-ci perd beaucoup de son potentiel.
Blazblue, chef d'oeuvre d'art et de gameplay.
Pour ces deux jeux, c'est le même principe que pour notre exemple : Si vous ne jouez pas le score, vous pourrez tout de même vous amusez, mais votre expérience en sera altérée : Vous ne jouerez pas au jeu tel qu'il a été pensé en scorant, mais tel qu'il a été pensé en jouant normalement, sans chercher à approfondir le jeu.
Il y a donc, dans ces jeux, deux types de gameplay : Un gameplay pensé juste en terme de "fun", avec, dans le cas d'un shoot'em'up, un bon feeling des armes, de beaux graphismes, etc...
Puis, il y a  le deuxième type, la face qu'on pourrait appeler "cachée" (même si elle ne l'est pas vraiment) : C'est le scoring, les chaines, et tout le gameplay qui s'en suit. Ce serait la partie la plus aboutie, la plus complexe du jeu, accessible uniquement par ceux qui s'en donne la peine, et, au final, la vraie nature du jeu, la plus intéressante, celle qui donne tout son sel à l'expérience.

Une nature véritable qui ne se dévoile qu'aux plus patients et persévérants des joueurs, mais avec à la clef des récompenses à la hauteur de l'effort fourni.
Dans le cas du shoot'em'up, découvrir ce nouvel aspect du gameplay n'est, au final, qu'une évolution logique de notre perception du jeu : Si celui-ci nous accroche ou que nous nous donnons la peine d'y persévérer, alors nous en arriverons forcément à appréhender cette facette du jeu.
Un des facteurs principaux pouvant expliquer que des joueurs n'approfondissent pas une expérience vidéoludique est le niveau de difficulté : Qu'un jeu soit trop facile et les joueurs le finiront d'une traite, sans faire attention à un système de gameplay plus complexe ne servant à rien car totalement gangrené par un manque de challenge (n'est-ce pas Assassin's Creed ou vous, les RPG Triple-A à la Mass Effect ou Fallout 3 ?); Qu'il soit buggué et/ou mal équilibré, les joueurs ne voudront pas se faire du mal à poursuivre l'expérience.
Persona premier du nom, un bon exemple de gameplay profond caché sous des monticules de défauts (difficulté, persona cheatés, etc...)
Heureusement, beaucoup de jeux ne souffrent pas de tel défauts.
Bien au contraire, la plupart des jeux proposant une dualité dans leur système de jeu la hiérarchise, de sorte qu'un premier walkthrough permet de découvrir l'existence du deuxième système, et invite le joueur à s'y intéresser.
Dans les RPG par exemple, ce peut être un "New Game+" qui rajoute un épilogue au scénario (Par exemple, les fins secrètes des Kingdom Hearts) ou la perspective de puissance en plus, comme dans un Diablo. Dans ces deux jeux, ce n'est pas vraiment un nouveau système de jeu qui se dévoile alors, mais une élévation du niveau de difficulté amenant à se pencher plus sérieusement sur les mécaniques de gameplay de celui-ci, présente dés le départ mais sous exploité par les joueurs à cause d'une difficulté peu élevée.
Wild Arms 5, un système de jeu profond gâché par une difficulté inexistante.
Et c'est bien le problème principal de bien des jeux : Leur face cachée ne se révèle bien souvent qu'avec celle-ci. La difficulté est source de challenge, mais aussi de découverte : Jouez à un Bioshock en difficile, et vous aurez une expérience très différente, croyez-moi...
Une bonne difficulté stimule et encourage le joueur à se surpasser, soit en terme de skill, soit en terme d'intelligence. Le jeu s'en trouve bonifié, et marque souvent bien plus les joueurs que d'autres expériences, tout aussi intéressantes mais manquant de piquant. La difficulté est comme la sauce d'un plat : On peut apprécier quand elle est absente, mais il manque quelque chose pour que ce soit exquis.

Mais si la difficulté permet d'améliorer une expérience de jeu en la rendant plus profonde, elle peut également la changer totalement.
Je prendrais ici, une fois n'est pas coutume, deux exemples : Orcs Must Die! et Hotline Miami.

Le premier est un tower-defense action fort sympathique, développé par Robot Entertainment. Le but du jeu est simple : à l'aide d'armes, de sorts et de pièges, on doit empêcher les Orcs d'arriver à la fin du niveau.
En mode "WarMage" (soit "normal'), le jeu est simplement un Tower-defense bien équilibré, ou vous devrez utiliser votre arbalète et peut-être un sort, mais c'est tout, pour triompher des peaux-verte. Dans ce mode de jeu, on a bien plus affaire à un tower-defense qu'à un jeu d'action.


Le mode "Nightmare" change tout. Les pauses entre les vagues sont supprimés, et le nombre d'ennemis spéciaux augmente considérablement. Le jeu devient alors réellement "action" : Vous devrez utiliser vos sorts au mieux sous peine de ne jamais passer les niveaux.
Dans ce jeu en particulier, la notion de "dualité" de gameplay est simplement matérialisé par le niveau de difficulté. Le mode normal permet d'avoir une expérience tout à fait satisfaisante, mais ceux qui le souhaitent peuvent se frotter à un mode plus corsé, ou le joueur devra s'intéresser à toutes les mécaniques de gameplay auparavant laissés de côté (Je prendrais ici mon exemple : Je n'ai utilisé appris à utiliser les sorts qu'avec ce mode, puisque je n'en avait pas l'utilité en mode normal). Iic néanmoins, Il n'y a pas spécialement de bonus, le challenge se suffisant à lui-même pour motiver le joueur.

La dualité dans le gameplay d'Hotline Miami est autrement plus intéressante. Le jeu ne propose, de base, pas de modes de difficultés : Le joueur lambda finira donc le jeu en 4-6 heures (suivant son niveau de skill). Mais son deuxième niveau de gameplay est bien meilleur.
On retrouve dans ce jeu un système de score, avec une note donné à chaque fin de niveau, allant de C- à A+. Avoir un haut score permet d'obtenir des points, points nécessaires à l'obtention de nouvelles armes et masques. Le joueur moyen pourra, par chance, en débloquer quelque uns lors de "run" plus propre qu'à l'accoutumé. Mais le joeuur intéressé par le A+ sur tout les chapitres devra alors étudier le système de scoring du jeu, afin de bien comprendre comment engranger des points. Il découvrira alors un système de combos, système essentiel qu'il devra maîtriser pour arriver à ses fins.
Le jeu fait alors d'une pierre deux coups : D'une part, sa difficulté augmente de façon substantiel, et d'autres part son gameplay change. En effet, on aura alors moins affaire à un Die and Retry qu'à un puzzle-game : Le joueur souhaitant le run parfait devra mémoriser le pattern des soldats, se faire une route et millimétré chacun de ses mouvements.

Pour ce dernier exemple, ce n'est pas tant la difficulté qui change le jeu, mais le score. Or, nous l'avons vu, score et difficulté permettent au joueur de découvrir d'autres facettes de leurs jeux, facettes qui , en général, l'approfondissent et rendent le jeu bien plus attrayant.
C'est le principe du "Easy to learn, hard to master" : Les jeux doivent être accessible pour attirer le chaland, puis le faire rester par des systèmes plus complexes à même de le retenir. Il serait bon de rappeler cette règle de base aux développeurs qui, bien souvent, préfèrent rendre leur jeu facile en insistant sur d'autres aspects de leur produit : Graphisme, musique, etc...
Cela est bien dommage, car proposer une dualité de gameplay, que ce soit par la difficulté ou le score, permet d'ancrer le jeu dans les esprits, de lui donner une plus grande consistance dans l'esprit du joueur, qui y verra alors une motivation à y rejouer, encore et encore. Dans un milieu ou beaucoup de développeurs regrettent que 60% des joueurs ne finissent pas leur jeu, il serait temps de revenir à l'idée citée plus haut.


Il est temps pour eux de proposer des jeux riches, à plusieurs niveaux de gameplay (comme le cinéma peut proposer des films à plusieurs niveaux de lecture), mais également pour les joueurs de se rendre compte de cette dualité, et d'arrêter de "rusher" leurs jeux. Les humble bundle et autres soldes Steam, depuis leur apparition, ont tendances à diminuer l’Intérêt du joueur, qui peut désormais s'offrir plein de jeux pour un prix modique.
Sauf qu'un "Back-log" remplit de jeu donne moins l'envie à ceux-ci de découvrir dans leurs moindres recoin les jeux qu'ils possèdent. Soit ils les finissent à la va-vite, en rushant la fin, soit ils y jouent 5 minutes et, sans leur laisser la moindre chance, désinstallent les soft n'ayant pus capter leur attention durant ce laps de temps.

Il est temps, non pas de découvrir la face cachée de nos jeux, mais de prendre le temps de la redécouvrir. Cessez de rusher vos jeux, cessez d'abandonner les softs au bout de deux minutes : Donnez vous pour objectif de finir à  vos achats, de jouer plus de cinq minutes pour vous faire une idée. Redonnez du temps au temps.

Dans un loisir accusé d'être celui de sur-consommateurs, pratiqué par des boulimique impulsifs oubliant ce à quoi ils ont joués tellement ils jouent, le temps est venu pour nous, les joueurs, d'affirmer notre culture en en revendiquant chaque parcelle, chaque produit, chaque oeuvre. Et quoi de mieux pour cela que de les explorez en profondeur ?

Laissez aux jeux le temps de vous montrer ce qu'ils valent.

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L'Avis De NeM

Qui dit « Score », dit « GamePlay » : devoir enchainer les « HIT » sur un Shmup au point de parfois « attendre » avant de tirer et de tuer un mob et ainsi ne pas perdre sa série est une preuve certaine d’investissement dans ce type de jeu.

Seulement voilà : je n’aime pas ça, j’irais même jusqu’à dire que je honnis un tel système : pourquoi une telle contrainte alors qu’un shmup est déjà ultra hardcore ; pourquoi ne pas donner une récompense égale pour chaque type de mob et sans inclure de multiplicateur influé par le temps.
Quand on commence à intégrer une composante temporelle à un jeu, on y incorpore également une composante de stress, et quand un jeu commence à « stresser », c’est qu’il a franchis la ligne jaune.
Attention, comprenez-moi bien : une tension doit exister, il faut avoir peur de mourir tout en scorant le plus possible.

Le Poulpe et moi discutons souvent de scoring sans le savoir : il a parfois du mal à comprendre le plaisir que j’éprouve à finir premier et à avoir des ratios positifs d’Elimination/Mort et de Victoire/Défaite sur Call Of Duty (Ouuuuh je pense que nous avons perdu une dizaine de lecteur tout d’un coup :D !).
Mais après tout, que le scoring soit coopératif ou compétitif, synchrone ou asynchrone, il justifie toujours sa présence, car il permet de nous mesurer aux autres joueurs, aux amis comme aux inconnus, à la plèbe comme aux plus fortunés, car seul le « skill », le talent du joueur, détermine qui vainc, et qui perd.


« Le meilleur moyen de gagner, reste encore de ne pas jouer »
Wargame

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